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L’anglais utilise le mot «vanila» pour décrire la transparence, la banalité. Le mot convient parfaitement à l’univers des plaisirs sucrés, aseptisés par l’industrie. Avec Mad Lab, Cyril sort la pâtisserie de cette léthargie vanillée: épice ses biscuits de goûts «adultes».

«Je trouvais la pâtisserie traditionnelle transparente. En anglais, y a un terme pour ça: “vanila”. Ça renvoie à un goût banal, un peu fade, sans surprise. Parce que ce goût vanillé, on le retrouve dans tous les biscuits». Mains gantées, Cyril Beneche glisse ses créations dans de petits sachets de papier craft, tatoués des lettres noires «Mad Lab», sa gamme née en 2016. Il compte chaque palet en déplorant: «c’est triste, mais dans la plupart de ces trucs de supermarché, on sait pas définir ce qu’on mange. Elles sont interchangeables. Pour moi, y a moyen de faire passer autre chose que la vanille et le zeste de citron. Le biscuit, c’est une préparation facile. Mon job, c’est d’aller plus loin».

Alors ses biscuits, Cyril les épice. Littéralement. Baies roses, romarin et, surtout, gingembre, relèvent ces petites originalités artisanales sorties des fours de la cuisine partagée Co-oking à Anderlecht. «Je travaille le gingembre moi-même. Pour un confit, ça prend une semaine. Il faut réduire en sirop, il faut bouillir plusieurs fois…»

«Biscuit adulte» au gingembre

Les quantités de fruits et racines bio qui passent entre les mains du pâtissier chaque semaine sont astronomiques. «Je dirais 5kg de gingembre, 15kg de citron, autant de clémentines… Pour la fin d’année, je produis 60kg par semaine. Je dois atteindre ce rythme de croisière à l’avenir. Pour ça, je vais m’équiper d’une rotative à biscuits».

On chipe un biscuit avant qu’il tombe dans son paquet. Une note torréfiée nuance l’acidité franche du citron. Le sésame noir est un autre ingrédient inhabituel des sucreries Mad Lab, finalement très peu sucrées. «Je veux un biscuit adulte. Dès l’entame, on goûte un vrai parfum. Pas le sucre. En bouche, ce goût évolue en plusieurs étages». L’inspiration de Cyril vient du Parisien Guillaume Gil, chef du Colorova où le néo-Bruxellois a transité. «Son entremets sésame noir-citron, c’était sa tuerie». Cyril s’en sort pas mal non plus.

Croquantes et sablées, douces et relevées, piquantes et rondes: les 4 bébés de Mad Lab font dans la nuance. Et dans l’inédit. «Ni chocolat, ni spéculoos: je laisse ça à ceux qui maîtrisent déjà. Je veux me démarquer. Par contre, pas de concession sur la base: mes biscuits sont pleins d’allergènes, de noix, de beurre et de sucre».

Géologie

Mais comment un ancien… géologue minier en Australie en arrive-t-il à creuser son trou dans la pâtisserie bruxelloise? «Je suis né à Paris mais j’ai vécu sur les 4 continents. Je suis à Bruxelles depuis un an et demi. J’ai travaillé dans un salon de thé et, à la fin de mon contrat, j’ai tenté de me lancer. On m’a proposé la vente de petites quantités par internet, mais je me suis dit qu’il n’y aurait pas beaucoup de différence à produire un peu plus pour être présent en magasin».

D’accord, mais pourquoi le biscuit? «Je cuisinais pour des potes. On m’en réclamait souvent. Un jour, j’ai vidé mon placard pour mitonner un dessert pour une soirée. C’était assez urgent alors j’ai fait des biscuits: la pâte, c’est assez facile. J’ai corsé avec des baies roses et des zestes de clémentine. La recette est encore celle du “Red Morning Light”».

Sauvagerie

Ah oui: on vous l’a pas encore dit, mais les délices noisettés de Cyril portent des noms à coucher dehors. Sa famille compte 4 gosses un peu sauvages, chacun dans son style. Y a « Sex on Fire», chaud lapin au gingembre; «Nice Boys», gendre idéal au citron confit, noisette et romarin; «Antisocial», rebelle unisexe à blouson de sésame noir; et «Red Morning Light» donc, princesse piquante qu’on ne doit pas chatouiller au réveil. Fan de musique, leur papa a baptisé ses créatures de titres de tubes des Kings of Leon, Guns N’Roses et Trust.

Le clin d’œil se renforce par leur silhouette en forme de médiator, le lien entre l’homme et la guitare. Un habit évident pour ces pépites aux noms très rock. Si la playlist de Cyril s’enrichit d’un titre des Stones, on n’en sera pas étonné, venant d’un géologue.

Source: https://www.lavenir.net/cnt/dmf20161222_00934630/mad-lab-epice-ses-biscuits-adultes-de-gingembre-poivre-rose-et-rock

Rédigé par: Julien RENSONNET

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